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L'ETRANGE AVENTURE DU PROFESSEUR PAMPHLEGME

par Luc ALBERNY, Editions Eugène Figuière, Paris, 1933.

Résumé : Pamphlegme, petit professeur de la ville de Grantroude est brimé par son épouse Eudoxie qui l'empêche de jouer au piano sa musique si curieuse. Sa minable vie est bouleversée lorsque la comtesse du Boy de la Rouhe lui demande d'instruire son fils Adhémar. C'est une sacré famille de fêlés. Le frère, le marquis du Cour de l'Oo est peintre et chef de file du mouvement gagaïste. Son oeuvre maîtresse "Idylle à Guéthary" à des verts subversifs, indécents qui choquent Pamphlegme (elle a été refusée au salon des Extrémistes, les Surréalistes l'avaient déjà reniés). Pamphlegme et Adhémar créent ensemble une musique si transcendante qu'elle attire deux étranges personnes venues de nulle part. Cette jeune fille nue et une autre femme à demi dévêtue sont en fait rien moins que la pudique Junon, la femme de Zeus et Leia, une chaste nymphe assez échauffée.

Car les éternels dieux grecs ont tout simplement quitté l'Olympe pour se réfugier dans la Quatrième Dimension (l'Enverleur) où l'on ne vieillit pas. Junon en avait marre des manières de Zeus ; Lui qui ne se gêne pas pour se taper des mortelles en employant toutes sortes de stratagèmes ! Leia en avait, quant à elle, assez des Satyres du lac d'Amour. Elles sont tombées sous le charme de la musique d'Adhémar et de Pamphlo et s'empressent de leur prodiguer moultes câlineries. Présentées à la comtesse comme leurs cousines de Saint-Olympe, la déesse et la nymphe font leur entrée officielle au château. Leia préfère se balader à poil et cette conduite jugée scandaleuse sème le trouble dans Grantroude. Pamphlegme est alors mis à la porte de son école.

Dans la Quatrième dimension, Zeus est assez découragé. Ses prouesses amoureuses ont consisté ces derniers siècles, par exemple, à se transformer en cette tortue sur laquelle une femme de lettres aimait reposer le pied nu ! Et la fugue de Junon le déprime au point qu'il se désintéresse de tout ; y compris d'envoyer une comète à l'heure dite pour qu'Einstein puisse continuer à réviser des lois scientifiques tombées en désuétude. Les humains ont non seulement perdu foi en leurs antiques croyances, mais les progrès conjugués de la science et de l'art commencent à leur faire entrevoir l'existence des dimensions autres. Zeus en apprenant son cocufiage charge Hermès et Athéna de faire revenir les deux fugueuses. Arrivés au château, les deux enquêteurs divins constatent que le tableau susmentionné du chef de l'école gagaïste prouve qu'il commence à percevoir la Quatrième Dimension. La comtesse reconnaît en Hermès le bel Epiraclès, ce mystérieux Grec qui l'aima un après midi dans le bois de Guéthary lorsqu'elle n'avait que 16 ans. Ayant narré cette escapade à son frère 15 ans plus tard, il en fit le sujet de son fameux tableau dont le vert astral subjuguent les dieux et les mortels. Le marquis travaille à présent sur le jaune qui n'est que "la fausse projection de deux plans gagallèles de rouge".

La terrible Eudoxie vient récupérer son Pamphlegme jusqu'au château. Athéna a le coup de foudre pour le marquis. Hermès s'envoie à nouveau la comtesse en plein air et chaque fois que deux pandores venus pour constater ces débauches veulent faire un constat, le dieu s'est évaporé en passant dans l'Enverleur. Pamphlegme se fait soigner son bras cassé par Eudoxie chez le docteur Plasmode qu'il tente de convaincre sans grand succès de l'existence de la Quatrième Dimension. Arrive alors le plus grand médecin de tous les temps, Esculape, qui leur fait une démonstration de disparition instantanée en passant dans la "Quatrième". Il leur déclare que c'est l'Œil Pinéal qui permet de déceler cette autre dimension. C'est la faute d'Adamnos, le premier des hommes qui perdit la capacité de se servir de ce 6 ème sens en acceptant le fruit d'Eva. Zeus a chargé Esculape de récupérer Junon avant qu'elle ne soit trop vieillie par son séjour dans la "Troisième".

Pendant ce temps, le marquis conçoit son chef d'œuvre qui outrepasse même le gagaïsme ; un tableau sans toile intitulé "Eternité" dont seul le cadre est décoré de quelques traits. Adhémar continue ses improvisations musicales en approchant toujours plus de la perception de l'Enverleur. Atterrés par les progrès des humains et par les premiers signes de leur propre vieillissement, les dieux fugueurs se décident à réintégrer la cour de Zeus. Leia se voit attribuer un Faune pour s'occuper. Zeus pardonne à Junon. Quant à Hermès, il ramène une chaude pisse vite soignée par Esculape. Pendant ce temps chez les mortels, Pamphlegme a réintégré son poste de professeur grâce aux relations de la comtesse. Eudoxie a été domptée. Elle accepte sagement qu'il poursuive ses recherches musicales.

Quant à Adhémar et au marquis, ils sont toujours "perdus dans l'immatérialité des hyperespaces". Le premier travaille à sa "Dysphonie fantastique" ; le second après avoir présenté son manifeste contre la toile termine "Nihilité", une œuvre encore plus révolutionnaire dans laquelle il a également supprimé le cadre et qu'il peint en traçant des formes à main levée dans l'air. Le docteur Plasmode est le plus malchanceux. Sa dernière communication sur "le rôle de la glande pinéale dans la perception d'une quatrième dimension de l'espace" a attiré sur lui les foudres du monde savant. Quant à la comtesse, elle peut recommencer à présider des ventes de charité en parlant à ses amies de ses cousins, les Saint-Olympes, qui eurent jadis en Grèce d'immenses propriétés.

Note : Voilà un roman tout bonnement délectable, on y trouve la notion que l'art et la science s'engagent parfois sur des voies convergentes en balisant simultanément un nouveau domaine de l'esprit. A noter également que Jean Ray a pu s'inspirer pour son "Malpertuis" de l'idée d'Alberny selon laquelle les Dieux de l'Olympe n'auraient pas tout à fait disparus. Là s'arrête l'emprunt, le "Pamphlegme" est un divertissement joyeux qui se moque gentiment des délires de l'avant-garde artistique de son temps.

© Jean-Louis Brodu 2003

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